Nicolas-Charles de Silvestre fut brièvement retenu au Fort l'Évêque fin juillet - début août 1752.
Mécontent de voir lui échapper la place de la place de garde des dessins du Cabinet du Roi attribuée à Nicolas Cochin, il s'était plaint en termes assez vifs dans une lettre adressée à monsieur de Vandières, marquis de Marigny, ce qui lui valu une incarcération de quelques jours au Fort l'Évêque fin juillet en août 1752.
M. Silvestre1, maître à dessiner de M. le Dauphin, frère d'une demoiselle Silvestre, maitresse à dessiner de Mme la Dauphine, venue de Dresde après cette princesse, et qui passe pour la gouverner. Silvestre a donc demandé l'emploi de garde des dessins du Cabinet du Roi, vacant par la mort de Coypel. Mais M. de Vandières, qui en dispose, lui a préféré le fils de Cochin, fameux graveur. Silvestre a écrit à M. de Vandières une lettre injurieuse; il l'a montrée à sa sœur, la marquise de Pompadour et celle-ci au Roi, qui a fait mettre Silvestre au Fort- l'Évêque, où il est depuis quatre jours. Grande brouillerie du Dauphin, ou plutôt grande bouderie. Haine de la famille royale contre la favorite. Orage à la cour. Nous y verrons la sagesse du Dauphin, ou les mauvais conseils qu'il en peut recevoir.
M. le Dauphin, avant sa maladie, avait eu grande mortification, comme nous avons dit, de l'emprisonnement du sieur Silvestre, maître à dessiner des enfants de France, qui est aujourd'hui au For-l'Évêque, pour la lettre insolente qu'il a écrite à M. de Vandières. L'on dit même que le roi avait assez mal reçu M. le Dauphin sur ce qu'il lui en avait dit.
L'on parle d'une querelle sérieuse qu'il y a eu entre le Roi et M. le Dauphin. Comme le royaume est gouverné par Mme de Pompadour, on avait fait passer une affaire où M. Poisson, père de cette marquise, devait être à la tête : c'était, dit-on, une entreprise pour fournir des vivres à tout le royaume (je vois que c'est cette compagnie des vivres dont on m'a parlé il y a quelques jours). M. le Dauphin, poussé par ceux qui l'entourent, et ceux-ci poussés par l'avarice, y a demandé des intérêts; cela lui a donné occasion de parler contre M. Poisson et les parents de la marquise, sur quoi, il a dit des choses déplaisantes au Roi, comme, entre autres, que ledit sieur Poisson avait été condamné au gibet pour monopole de blés, il y a quatorze ans. La conversation s'est échauffée sur cela, ainsi que sur l'emprisonnement du sieur Silvestre, et M. le Dauphin s'est retiré à Versailles avec un chagrin qui lui a échauffé le sang et causé, dit-on, sa maladie.
Mémoires du marquis d'Argenson / Retenue de Nicolas-Charles de Silvestre au Fort l'Évêque
août 1752
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