13 avril 1751
Mademoiselle
Je ne saurais vous exprimer toute la joie que m’a causée votre lettre obligeante du 8 avril, qui n’apprenait le florissant état de la santé de Mme la Dauphine, et la prospérité parfaite avec laquelle cette auguste princesse avance dans sa grossesse.
Nous avons été altérés en apprenant le coup de maladresse de ses porteurs de chaise, qui aurait pu avoir des suites si fâcheuses pour son A. R. Mais, grâce à Dieu, la secousse qu'elle a essuyée n'a pas porté la moindre atteinte à nos espérances. Ce que Dieu garde est bien gardé, et j'espère que la Providence accomplira nos vœux, en accordant à Msr le Dauphin et à Mme la. Dauphine le fruit de leur heureuse union, que toute la France et toute la Saxe leur souhaitent, par la naissance d’un prince duc de Bourgogne.
Je prends la liberté d’écrire à Mme la Dauphine une lettre, ci jointe, qui accompagnera la petite commission dont elle a honoré Mme la comtesse et que celle-ci a bien voulu me confier à mon départ pour Leipzig. Ce sont de petits coffrets à défiler de différentes sortes que j'ai pu ramasser ici; mais je ne sais si j'aurai eu le sort de rencontrer le goût de S.A.R. Je vous prie, mademoiselle, d'excuser les fautes que j'ai pu commettre dans ce choix.
Mr le baron Le Fort, qui vous remettra ma lettre, s'est chargé de les porter a Mme la Dauphine, conjointement avec une autre boîte semblable, mais d’un prix et d’un goût bien différents, que Mgr le Prince Royal lui a confiée pour cette adorable princesse. C'est aussi Mr Le Fort qui vous apprendra, plus en détail, le bon état de la santé de la Famille Royale, et les autres nouvelles que vous souhaiterez avoir de nos contrées.
Madame la Princesse Royale ‘attend avec impatience le collier que Mr de Bellegarde doit lui envoyer. M. Hutin passe déjà, chez nous, pour ce que les Italiens appellent un virtuose dans son art, et ses belles manières lui attireront l'approbation et l'estime de tout le monde. Vous ne doutez plus, mademoiselle, que je ne me fasse un plaisir de lui rendre, en mon particulier, tous les services qui dépendront de moi.
Je suis mortifié d'apprendre l'état languissant de Mr votre père ; je souhaite que le bon Dieu lui rende ses forces, et vous le conserve encore de longues années. Assurez-le de mon inviolable amitié, et dites-lui que personne ne lui désire plus de bien et de prospérité que moi. L'espoir que nous avons d'apprendre bientôt l'entier rétablissement de Mr des Issarts cause ici un contentement infini à tous ceux qui ont l'honneur de le connaître.
Nous avons perdu Mme la comtesse de Collovrath, Grande Maîtresse de S.M. la Reine ; nous voilà privés, en peu de temps, de deux Grandes-Maîtresses dont le mérite vous était connu, et que nous regretterons longtemps. Dieu veuille préserver Mme la Dauphine de la perte de Mme la Duchesse de Brancas ; nous ne la connaissons ici que sur des rapports, mais ces rapports sont si avantageux, qu'on ne peut faire de vœux pour Mme la Dauphine sans penser à souhaiter une longue vie à Mme la Duchesse.
Conservez votre santé qui nous est également chère, et croyez-moi, avec toute la cordialité et la considération possibles,
Mademoiselle. . . . .
Lettre du comte de Wackerbarth à Marie-Maximilienne de Silvestre
13 avril 1751
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